Je vis un ange blanc qui passait sur ma tête ;
Son vol
éblouissant apaisait la tempête,
Et faisait taire au loin la
mer pleine de bruit.
- Qu'est-ce que tu viens faire, ange, dans
cette nuit ?
Lui dis-je. - Il répondit : - je viens prendre ton
âme. -
Et j'eus peur, car je vis que c'était une femme ;
Et
je lui dis, tremblant et lui tendant les bras :
- Que me
restera-t-il ? car tu t'envoleras. -
Il ne répondit pas ; le
ciel que l'ombre assiège
S'éteignait... - Si tu prends mon
âme, m'écriai-je,
Où l'emporteras-tu ? montre-moi dans quel
lieu.
Il se taisait toujours. - Ô passant du ciel bleu,
Es-tu
la mort ? lui dis-je, ou bien es-tu la vie ? -
Et la nuit
augmentait sur mon âme ravie,
Et l'ange devint noir, et dit : -
Je suis l'amour.
Mais son front sombre était plus charmant que
le jour,
Et je voyais, dans l'ombre où brillaient ses
prunelles,
Les astres à travers les plumes de ses ailes.
Victor Hugo (1802 - 1885)
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